mardi 25 janvier 2022

JEAN-CLAUDE MEZIERES (1938-2022)

 


Jean-Claude Mézières est mort. Il est parti rejoindre Valérian et Laureline dans les étoiles. 


Disparu le 23 Janvier dernier, à l'âge de 83 ans, Mézières était un authentique géant, pas seulement de la bande dessinée franco-belge, mais du 9ème Art, de ceux dont l'influence dépasse le média et qui a inspiré bien des artistes dans bien des domaines. 


Vous croyez que j'exagère ? Alors demandez donc à George Lucas où il a copieusement puisé ses idées graphiques pour sa saga Star Wars. Comme il ne vous répondra pas, car il ne l'a jamais admis, (re)lisez ensuite les albums de Valérian et Laureline et comparez les dates de sortie des livres et des films. C'est éloquent : Lucas a tout piqué à Mézières. Au point que, quand, finalement, Luc Besson adapatera Valérian et la Cité des Mille Planètes, en 2017, beaucoup penseront, c'est un comble, qu'il a plagié Lucas et sa Guerre des Etoiles, son esthétique, en étant revenu au matériau source !


Mézières et son scénariste ami d'enfance, Pierre Christin, s'amusaient de cette situation. Et sans doute était-ce la meilleure réaction, même si, pour les fans de la BD, un sentiment d'injustice persistait. Elève aux Arts Appliqués en 1957, avec Jean Giraud/Moebius (dont il disait que l'avoir comme camarade obligeait chacun à se surpasser), Mézières rencontrera grâce à lui Jijé puis Franquin, avant de partir en voyage aux Etats-Unis avec lui en 1964. Ce sera une révélation pour cet amoureux des grands espaces, qui y retournera fréquemment.
 


En 1967, à la recherche d'une idée d'histoire à suivre, il pitche avec Christin ce qui deviendra Valérian (rebaptisé plus tard Valérian et Laureline), fruit de leur passion pour la science-fiction. Naissance d'une oeuvre révolutionnaire qui ne se cantonne pas au space opera mais réfléchit aussi aux luttes de pouvoir, à la politique, à l'essor technologique, à l'écologie, au futurisme : se plonger dans cette série, c'est s'assurer de longues heures de lecture captivantes mais aussi de relectures inépuisables. Christin et Mézières font feu de tout bois, le dessinateur créant un univers visuel incomparable, avec dss vaisseaux insensés, des décors inoubliables, des personnages charismatiques. J'ai découvert en même temps Valérian et Laureline et Lone Sloane, de Druillet, et je ne m'en suis jamais remis.

Dans les années 70, Mézières est invité à enseigner son art et il instruira Régis Loisel et André Juillard notamment. En 1987, il reçoit le Grand Prix du festival de la bande dessinée d'Angoulême. Au début des années 90, il collabore à la production design du film Le Cinquième Elément de Luc Besson, qui voue à Mézières et Moebius une admiration sans bornes : une expérience que les deux artistes apprécieront énormément pour le respect porté à leur contribution, et qui participera au succès du film en 1997. 

En 2004, Mézières et Christin mettent un fin aux aventures de Valérian et Laureline, mais accepteront que Lupano et Lauffray en fassent leur version (très belle visuellement, mais raté narrativement). Qui osera se frotter à nouveau au couple d'agents du Service Spatio-Temporel de Galaxity ?
 


Pour conclure cet hommage à un dessinateur dont j'admirai la productivité, la narration impeccable, l'inventivité et l'humilité, je voulais revenir sur un passage à la fin de Brooklyn Station Terminus Cosmos, paru en 1981, le premier tome de la série que j'ai lu. Il forme avec Métro Châtelet Direction Cassiopée (sorti un an avant) un diptyque culte pour une histoire palpitante. Si j'ai choisi cet extrait, c'est parce qu'on y assiste à un effeuillage de Laureline, dont je tombais alors totalement amoureux, qui se transforme alors en vamp vêtue de cuir pour tourner la tête (et flinguer) deux gredins extraterrestres. Une scène mémorable, entrée au panthéon, et qui résume tout ce que j'aime chez Mézières (et Christin).







Lisez, relisez Valérian et Laureline, pour saluer la mémoire de Jean-Claude Mézières, et vous régaler de son génie.

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