vendredi 20 août 2021

CATWOMAN #34, de Ram V et Fernando Blanco


Ce trente-quatrième épisode de Catwoman marque une étape dans la série écrite par Ram V puisque le scénariste perd son dessinateur, Fernando Blanco (appelé sur un autre projet pour l'instant secret). Mais aussi parce que le mois prochain, Catwoman est embarquée dans le crossover Fear State. Il s'agit donc de conclure en beauté, ce que ne manquent pas de faire Ram V et Fernando Blanco.


Blessée par le Père Vallée, Catwoman a été sauvée de la noyade par Batman. Il a pu la retrouver à temps grâce au détective Hadley du GCPD qui l'a prévenu qu'un tueur était aux trousses de Catwoman. Batman remet à sa partenaire des infos sur Vallée qui devrait lui permettre de le vaincre.


Cependant, Hadley se rend dans les ruines de l'église St-Thomas, détruite par Vallée et y trouve un plan calciné à partir duquel il déduit que l'assassin a une autre cible que Catwoman. Cette dernière fonce dans le repaire de son adversaire et découvre qu'il tient sa soeur Maggie dans sa ligne de tir.


Catwoman engage le combat mais le Père Vallée la domine car il a l'avantage d'avoir étudié ses techniques de combat. Mais Catwoman a des ressources et réussit à se reprendre. Cependant, Hadley calcule d'après les positions du plan laissé par Vallée ce qu'il vise.


Catwoman réussit à blesser mortellement Vallée mais celui-ci a encore un tour dans son sac : il actionne le tir de son fusil pour abattre Maggie. Hadley surgit sur la terrasse de cette dernière. Une détonation éclate en même temps que Vallée se jette dans le vide et se fait exploser...

Voilà une nouvelle leçon de narration prodiguée par Ram V et Fernando Blanco. J'espère vraiment que le dessinateur laisse tomber Catwoman pour un projet qui vaut le coup car il manquera cruellement à la série sur laquelle il accomplissait un magnifique travail et affichait une complicité épatante avec son scénariste.

Car, ou, le moment est venu pour Fernando Blanco de faire ses adieux à Catwoman. Depuis 2018, où il a régulièrement oeuvré comme fill-in artist sur le run de Joelle Jones jusqu'à 2021 où il est devenu titulaire du poste, le dessinateur espagnol a bien servi les aventures de la féline fatale. Son trait charbonneux, ses compositions inventives et magnifiquement équilibrées, son sens du découpage souvent prodigieux, ont permis au titre d'avoir une stabilité graphique qui lui manquait auparavant (Jones ayant connu des difficultés récurrentes à cumuler scénario et dessin).

Encore une fois, Blanco livre des planches superbes où son talent éblouit. Ce numéro est riche en action et alimenté par un suspense crescendo jusqu'à la toute dernière image. Il sert intelligemment le script en sachant mettre en valeur les points forts de l'histoire, qui file sur un rythme soutenu, implacable.

On retiendra bien entendu principalement l'affrontement entre Catwoman et le Père Vallée qui tient toutes ses promesses : brutal, impitoyable, intense, il est mis en image avec un savoir-faire indéniable. Blanco ne sacrifie rien : ni les décors, ni les jeux d'ombres et de lumière, les angles de vue dynamique, l'expressivité des personnages. On vibre durant ce combat où il est clair dès le début qu'un des deux ne survivra pas. La personnalité malade du Père Vallée transforme l'issue de cette bagarre non pas en règlement de comptes ni en application d'une justice expéditive, mais bien comme la traduction d'un comportement radicalisé face à une Catwoman qui, elle, lutte pour sa survie et celle de sa soeur.

Avant cela, Ram V nous éblouit encore par l'assurance de son écriture. On a là un auteur qui sait exactement où il va et ce qu'il ambitionne, qui entraîne le lecteur où il l'a décidé. Ce n'est pas étonnant qu'on se l'arrache et on peut s'étonner que DC ne lui ait pas fait signer un contrat d'exclusivité (mais l'éditeur est désormais dans une politique incongrue qui consiste à ne pas s'attacher les services de ses scénaristes pour ne pas avoir à supporter des salaires trop élevés, quitte ensuite à assister à une fuite des talents).

Ram V a en tout cas prouvé qu'il était à la hauteur non seulement du job mais surtout de ses références. Quand on prend pour maîtres-étalons quelqu'un comme Ed Brubaker, mieux vaut être sûr de son affaire car ce dernier avait totalement révolutionné Catwoman en son temps (avec l'aide non négligeable de Darwyn Cooke).

Mais Ram V n'est pas qu'un bon élève appliqué : son style existe et se traduit par une maîtrise du tempo, des temps forts et des temps calmes, vraiment bluffante. Lorsqu'il accélère, impossible de ne pas être emporté par son swing, et cet épisode est une démonstration. Passées les premières pages qui voit la réunion de Batman et Catwoman sur un mode mi-romantique mi-taquin, une fois que le Père Vallée défie son ennemie, c'est un défilé de pages sensationnelles, qui vous prend à la gorge et vous laisse sidéré à la toute fin. La dernière image encore une fois vous cueille complètement.

Même si je doute que ce soit la solution choisie par DC en Décembre, si Ram V succédait à Tynion IV pour prendre la direction de Batman, mais sans lâcher Catwoman, on pourrait alors avoir une parfaite synthèse entre l'option action de ces derniers mois et celle plus psychologico-sentimentale de Tom King (car j'aimerai vraiment que le couple BatCat se reforme tout en leur conservant leurs séries propres).

Espérons surtout que Catwoman maintienne cette qualité dans les prochains mois et que Nina Vakueva, qui remplacera Blanco au dessin, soit digne d'un niveau comparable. Ce sera difficile mais je croise les doigts car j'aime cette série et je déplorerai de la lâcher à cause de mauvais dessins. 

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