jeudi 8 juillet 2021

X-MEN #1, de Gerry Duggan et Pepe Larraz


On y est : le premier n° de X-Men est sorti. Le passage de relais entre Jonathan Hickman qui animait ce titre depuis 2020 et Gerry Duggan (qui écrit également Marauders et Cable) est accompli. Ce dernier retrouve son partenaire de Uncanny Avengers, Pepe Larraz, au dessin. Tout est réuni pour une réussite, critique et commerciale; Et c'est vrai que ce relaunch est efficace, plaisant. Même s'il fait penser à une célèbre mini-série culte...


Dans la 86ème rue dans le quartier de Central Park, les X-Men ont établi leur nouveau Q.G. qui prend la forme d'un gigantesque bonsaï techno-végétal. Cyclope guide Polaris dans les installations réalisées par Krakoa, Cypher, Forge, Tempo et Synch. Mais la visite est abrégée par une alerte de Marvel Girl.


En effet, Malicia a tenté de stopper la chute d'un énorme engin dans New York. Il a révélé une créature gigantesque sur laquelle les pouvoirs de Polaris sont inopérants. Une attaque pyschique du monstre oblige les X-Men à s'isoler pour réfléchir à leur riposte.


Toujours synchronisé au pouvoir de Forge, Synch élabore une stratégie et avec Polaris et Sunfire, il bâtit un robot géant à même de rivaliser avec leur adversaire. La bataille, spectaculaire, tourne court, à l'avantage des mutants, dont la victoire est saluée par les 4 Fantastiques et les Avengers.
 

Les X-Men ont réussi leur retour. Ben Urich, qui, quelques heures plus tôt, interrogeait Cyclope sur l'installation de son équipe et leur repaire atypique mais aussi sur la résurrection de mutants, se fend d'un article dans lequel il appelle à accueillir avec bienveillance ces nouveaux héros.


Loin de là, sur le Gameworld, cette bataille a ruiné des joueurs qui avaient misé gros sur la défaite des X-Men. Le propriétaire du casino, Cordyceps Jones veut conquérir la Terre en se débarrassant des humains et défie ses plus gros joueurs, parmi lesquels le Maître de l'Evolution...

Il y a dans ce n° 1 tout ce qu'on en attendait. C'est donc une réussite imparable, qui va certainement réconcilier avec les X-Men des lecteurs de la franchise un peu déroutés par ce qu'écrivait Jonathan Hickman sur ce titre - en vérité un véhicule pour animer la franchise toute entière et poser les jalons des différents stades de son run depuis HoX - PoX.

Confier cette mission à Gerry Duggan ne doit rien au hasard et on comprend tout à fait pourquoi Hickman a passé la main. Ce qu'écrit Duggan n'a rien à voir avec ce que faisait jusqu'à présent Hickman. Duggan est un entertainer là où Hickman est un architecte. Ce n'est pas diminuer le travail du premier de le qualifier ainsi par rapport à celui de second : c'est un fait évident. Même quand il a produit des events, Hickman a fait en sorte que l'action reste cantonné au minimum syndical, préférant les intrigues en coulisses, bref tout ce qui précéde et suit la bataille. Alors que Duggan adore la baston et s'en amuse franchement avec des personnages qui en sont eux-même friands.

Duggan n'a dû composer qu'avec un élément à l'heure de reprendre les rênes de X-Men : élue par les fans, Polaris n'était pas la mutante pour laquelle il avait voté, il préférait Tempo - et d'ailleurs il va l'incorporer aux Marauders. Mais, pour rassurer ceux qui aiment Lorna Dane (comme, au premier rang, son dessinateur), il a promis de lui donner un rôle éminent en lui épargnant les absurdités qu'elle a longtemps subies (crises de folie récurrentes, romance intermittente avec Havok).

Pepe Larraz a, depuis House of X, paru devenir le nouveau dessinateur à events de Marvel, et particulièrement de la franchise X. A part ses couvertures pour la série Black Cat, il n'est sorti de sa boîte que pour des épisodes spéciaux, fort généreux en pagination, comme si l'éditeur souhaitait le ménager et ne l'employer que pour les grandes occasions. C'était frustrant pour ses fans étant donné le talent de l'espagnol (loué aussi bien par le public que par ses confrères). Mais au moins ne s'est-il pas épuisé sur des sagas moyennes, comme tant d'autres avant lui (Steve McNiven, Olivier Coipel, Leinil Yu...), et surtout Marvel ne l'a pas laissé filer (chez Image Comics ou dans le Millarworld).

L'épisode s'ouvre sur un falshback concernant un certain Kelvin Heng, fils de savants, spolié par ses parents, puis revenu en haut de l'affiche, entrepreneur richissime et ambitieux, qui rêvait de conquérir Mars. Lorsqu'il apprend que les mutants viennent de coloniser la planète rouge et de rebaptiser, il en conçoit une légitime amertume et entreprend de se venger. La fin de l'épisode montre un savant expérimentant sur des cobayes humains dans le cadre d'une opération appelée "Leviathan" (on appelera ça, le zeitgeist, étant donné que c'est aussi le nom d'un organisation utilisée par Brian Bendis actuellement). Cet apprenti sorcier est-il Kelvin Heng ? Mystère. Mais, comme les méchants de la station Orchis, et le Dr. McGregor, lui aussi veut percer le secret de la résurrection des mutants.

Il n'est pas le seul à s'y intéresser car on croise aussi Ben Urich qui interroge Cyclope à ce sujet, sans obtenir de réponses. Cyclope a d'autres chats à fouetter (même s'il apprécie Urich) : en l'occurrence, il doit servir de guide à Polaris dans le nouveau, très original et incroyable nouveau repaire des X-Men. Pepe Larraz nous gratifie d'une double page à couper le souffle, avec un découpage d'une fluidité bluffante, où nous découvrons ce quartier général hors du commun, aussi émerveillé que Lorna Dane.

La suite éblouit de la même manière car Gerry Duggan a concocté un script à même de valoriser les capacités graphiques phénoménales de son partenaire. L'affrontement façon kaiju entre le monstre et le robot est à la fois cocasse, volontiers "hénaurme", et sacrément puissant. Le scénariste redistribue malicieusement les cartes au sein de l'équipe des X-Men : Cyclope en est le chef, mais la solution vient de Synch, et chacun a son petit moment pour briller (même si, bien entendu, on aimerait qu'il y ait eu encore plus de pages pour ça, mais avec 40 planches au compteur pour ce n°, on ne va quand même pas se plaindre).

La victoire des mutants ne reste pas sans écho : en effet, les deux autres grandes équipes de Marvel, les 4 Fantastiques et les Avengers, arrivent sur le champ de bataille après la bataille et félicitent les X-Men en pour leur célérité. Les intéressés savourent avec un brin d'arrogance, comme ils en ont le droit légitime (après la démonstration de force qu'ils ont produite lors du gala du Club des Damnés, ils savent - tout le monde sait - qu'ils doivent être les plus puissants héros de la Terre - chipant le titre aux Vengeurs). On apprend ensuite qu'un examen de la créature tombée du ciel atteste qu'elle était conçue pour supprimer toute forme de vie mammifère.

Le récit se déplace dans un casino mobile dans l'espace où des parieurs ont perdu gros en misant sur la défaite des mutants. L'initiateur de l'attaque, patron de l'établissement, veut prendre la Terre en se débarrassant de ses habitants et il s'adresse à de potentiels candidats pour l'aider dans ce projet. On reconnaît parmi eux le Maître de l'Evolution, qu'une telle entreprise ne peut laisser indifférent... Il est évident qu'on va le revoir vite et que Duggan dispose avec lui d'un gros calibre à même de contrarier les X-Men car Herbert Wyndham n'est pas n'importe qui.

Donc, tout ça est parfait. Il est difficile, voire impossible de résister à ce gros épisode, généreux, intense, marrant aussi, où Duggan et Larraz se dépensent sans compter, où chaque page est un régal pour les yeux.

Mais...

Mais lire des comics depuis des années vous donne, si tant est que vous ayez un peu de mémoire (ce qui n'est pas difficile quand on a lu quelques vrais séries mémorables), le privilège, parfois ingrat, d'établir des correspondances, de trouver des ressemblances troublantes d'un livre à un autre. Parfois, c'est totalement involontaire de la part des auteurs. Parfois aussi, le doute n'est guère permis. Mais je ne veux ni être professoral ni moraliste. Je vais simplement exposer des faits évidents.

Remplacer le monstre tombé du ciel par Fin Fang Foom, qui, lui, sortait de terre dans Nextwave #1-2. Dans l'équipe animée par Warren Ellis et Stuart Immonen, il n'y avait pas un grand robot pour l'affronter mais tout de même Machine Man qui finissait par se jeter dans la gueule du lézard géant pour finir dans son estomac et lui déchiqueter les tripes. Or, ici, grâce une ouverture permise par les efforts conjugés de Cyclope, Sunfire et Rogue, c'est Wolverine (Laura Kinney/X-23) qui plonge dans la gueule du kaiju spatial et va l'étriper aussi méthodiquement et sauvagement. A la fin de la bataille dans Nextwave, Aaron Stack sort de la panse de Fin Fang Foom en réclamant une bière. Ici, Wolverine s'extrait du ventre de la bête en disant qu'elle va avoir besoin d'une douche.

Gerry Duggan a de bonnes lectures. Mais gare au plagiat (ou en tout cas à ce qui y ressemble quand même fortement). On lui pardonnera pour nous avoir quand même diverti et offert un n°1 aussi jubilatoire. Mais attention, il ne faut pas abuser de l'undulgence des fans.  

1 commentaire:

  1. Hickman avait crée Leviathan dans sa série Secret Secret Warriors. Peut-être que Gerry Duggan fais un clin d'oeil à ce groupe.

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