samedi 20 mars 2021

THOR #13, de Donny Cates et Nic Klein


Pénultième épisode de Thor pour moi, ce numéro n'est pas meilleur que les précédents de cet arc (ni du premier). C'est une bien étrange série qu'écrit Donny Cates, où le dieu du tonnerre n'apparaît que dans trois pages, absent de sa propre aventure. Nic Klein empile les pleines pages pour camoufler la pauvreté de sa narration. 


Depuis qu'il a abdiqué, Odin a voyagé avec sa femme, Freyja, mais l'ennui l'a gagné et il a négligé son couple au point que Freyja, sa femme, l'a quitté. Depuis, il s'enivre dans une taverne où Jane Foster/Valkyrie le retrouve et l'informe de la crise née du retour de Donald Blake.


Pendant ce temps, le Dr. Strange et Throg rejoignent les asgardiens dans la dimension du sang grâce à Lockjaw. Loki veut faire payer Blake qui, déchaîné, mutile avec la hâche Jarnbjorn l'arbre de vie Yggdrasil à Asgard.


Blake voit revenir dans leur royaume les asgardiens mais les défie. C'esr alors que Odin apparaît et le frappe. Blake, dément, n'a pas peur du retour de son créateur mais ce dernier l'informe de l'erreur de s'en être pris à Yggdrasil car sa sève coule désormais dans la dimension où Thor est prisonnier.


Ainsi le dieu du tonnerre peut rappeler ses corbeaux, Huginn et Muninn, mais ceux-ci ne peuvent le ramener à Asgard. Thor a une autre idée et pour cela, les corbeaux doivent transférer son âme dans l'arme ultime du royaume...

Le mois prochain avec la parution du #14 de Thor, je cesserai mes critiques de cette série. Je n'ai tout simplement pas été convaincu par la proposition de Donny Cates alors que j'étais confiant. Mais il faut bien admettre que ce que fait Marvel avec le dieu du tonnerre ne cesse de me décevoir.

Je ne prétendrai pas que Thor fait partie de mes personnages favoris chez Marvel, mais je ne suis pas sûr que Jack Kirby, qui vouait une affection particulière au dieu du tonnerre, s'y retrouverait non plus. Pour Kirby, Thor était un véhicule pour exprimer sa passion de la mythologie, ce fut en quelque sorte la matrice de beaucoup d'autres de ses créations postérieures (comme New Gods, Eternals). Sa vision différait sensiblement de celle de Stan Lee, qui était spontanément plus inspiré par les héros de la rue, car Thor incarnait cette démesure qui était la marque du "king of comics".

En même temps, Thor était un personnage qui synthétisait la magie du duo Lee-Kirby grâce Donald Blake, l'alter ego du dieu du tonnerre. Pour Lee, il s'agissait d'un subterfuge pour humaniser un personnage dont les lecteurs risquaient de se sentier trop éloignés. Par la suite, au gré des auteurs qui ont animé la série, cette dualité a résumé la manière dont chacun appréhendait Thor. Pour certains, le dieu était plus intéressant. Pour d'autres, Blake (ou ceux qui l'ont remplacé occasionnellement) était essentiel.

Ces dernières années, Jason Aaron avait quasiment préféré oublier Blake, considérant qu'il n'existait pas vraiment, en tout cas qu'il ne servait pas ses plans. Ce n'était tout à fait infondé dans la mesure où Blake était une pure création d'Odin pour enseigner l'humilité à Thor. Mais, moi, j'aimais bien Blake et ce qu'il disait de Thor, tel que l'écrivit brillamment J. Michael Straczynski. Thor était peut-être devenu humble, mais pas vraiment plus avisé. Voir dialoguer Blake et Thor, c'était comme un aiguillon pour le dieu du tonnerre, sa (mauvaise) conscience.

Quand Donny Cates a annoncé qu'il allait ramener Blake dans la partie, j'étais plein d'espoir. Mais celui-ci fut vite douché quand je compris à quel fin le scénariste comptait utiliser l'alter ego de Thor. Néanmoins, je ne voulais pas préjuger de l'intrigue car l'idée était accrocheuse : Blake ayant été, littéralement, oublié dans une dimension, quand il était ramené à Asgard par Thor, n'était plus le même homme. Il avait pris conscience de sa nature et réclamait réparation pour avoir été négligé.

Le souci, c'est qu'avec un départ pareil, soit on a droit à une histoire de rédemption, de pardon ; soit on a droit à une histoire de vengeance. C'est cette seconde option qu'a choisi Cates et, ainsi, l'arc Prey se dévoilait comme un moyen de se débarrasser définitivement de Blake en en faisant un fou furieux qui ne laisserait pas d'autre choix à Thor que de l'éliminer. Cette trame, archi-prévisible, se déroule depuis cinq épisodes, en enchaînant les chapitres de manière poussive.

Après s'en être pris à Asgard et ses dieux, à Throg, à Jane Foster/Valkyrie, au Dr. Strange, profitant que Thor soit coincé là où l'était précédemment, Blake doit désormais faire face à son créateur, Odin. Cates répond à la question de savoir où était passé le Père-de-tout depuis la fin du run de Aaron, lorsqu'il a abdiqué en faveur de Thor. Sans panache ni imagination, le scénariste explique que Odin est parti dans une espèce de croisière avec Freyja, s'est ennuyé, a été quitté, et a échoué dans une taverne pour se soûler. Valkyrie le retrouve pour qu'il règle son compte à Blake et le convainc, (trop) vite, de sauver Thor et Asgard.

Lockjaw emmène le Dr. Strange dans la dimension où Blake a exilé les asgardiens pour les rapatrier dans leur royaume en vue de la bataille finale. Et Thor joue son va-tout grâce à une erreur tactique de Blake et l'aide de ses corbeaux.

J'ai lu tout ça sans jamais vibrer, être captivé. C'est plan-plan, convenu. Surtout Thor est complètement absent d'une histoire dont il est pourtant le coeur. Il apparaît dans trois pages, gueulant dans sa prison (il n'a rien fait d'autre depuis le début de cet arc). Le cliffhanger ne fait qu'employer comme un gadget un énième protagoniste de Asgard. Tout ça manque cruellement d'âme, d'esprit, c'est juste mécanique, bourrin.

Ce sentiment est renforcé par la mise en images, très décevante, de Nic Klein. Le dessinateur est vraiment en roue libre, on se demande si le script dont il dispose n'est pas écrit suivant la vieille méthode Marvel, où le scénariste se contentait de vagues indications avant de revenir poser les dialogues.

Rendez-vous compte : on compte pas moins de cinq splash-pages dans cet épisode. Je n'ai rien contre les splash, mais c'est tout de même le niveau zéro de la narration visuelle. Quand on utilise ce genre d'image, il faut le faire avec parcimonie pour que l'effet soit efficace, percutant. Plus vous en usez, moins c'est frappant. C'est juste un plan tape-à-l'oeil. Ici, entre un gros plan sur le visage d'Odin en pleine beuverie, le retour à Asgard de ses dieux avec le Dr. Strange et Lockjaw en renfort, Odin en armure tisant Blake, Thor hurlant en déployant un énorme éclair, et l'apparition à la dernière page de l'arme ultime, ce n'est que ça : des pages sans plus-value narrative, juste dessinées pour en mettre plein la vue, pour l'épate.

Comme c'était déjà le cas dans le premier arc qu'il a allustré, Nic Klein oublie le plus souvent les décors, on sent qu'il est cuit et expédie ses planches pour finir, en attendant de pouvoir souffler une fois l'arc fini. Matt Wilson gâche son talent en colorisant tout ça.

Il n'y a strictement rien à sauver, c'est un naufrage. Plus qu'un épisode et basta. 

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