jeudi 25 avril 2019

SKYWARD #12, de Joe Henderson et Lee Garbett


Ce mois-ci, Skyward s'offre un grand flash-back pour raconter l'histoire de Lilly Fowler, la mère de l'héroïne. C'est une audace que peut se payer une série condamnée et Joe Henderson se la permet tout en nous disant, à mots couverts, tout ce qu'il avait certainement prévu de développer en cas de succès. Lee Garbett délivre des planches encore une fois merveilleuses.


Il y a vingt ans. Nate Fowler fait promettre à sa femme, enceinte, Lilly de partir de se réfugier dans la ville souterraine de Crystal Springs qu'il a convaincu le gouvernement de bâtir en prévision du "G-Day".
  

L'événément a lieu plus tôt que prévu et alors que Nate croit voir Lilly périr en échappant à la gravité, elle survit miraculeusement. Accompagnée d'un chien, elle gagne l'abri où l'accueille Randy.


Les années passent. Randy et Lilly resten longtemps seuls dans leur souterrain et cette proximité noue leur relation amoureuse. Randy devient le maire de Crystal Springs et doit négocier avec le consei municipal de l'arrivée de nouveaux réfugiés.


Maîtresse d'école, Lilly  intercepte une radio trouvée par ses élèves à qui elle explique, comme elle le peut, pourquoi ils doivent rester sous terre. Puis un bulletin annonce l'attaque terroriste de Chicago, nommant Willa comme son auteur.


Bravant l'interdiction de quitter Crystal Springs, Lilly part à la recherche de Willa et la ramène avec Roger Barrow. Celui-ci, soulagé que son business ne soit pas menacé par la "solution" de Nate, veu repartir. Mais Randy l'en empêche en condamnant les issues. Willa est donc également coincée...

La fin de Skyward approchant chaque mois davantge (elle aura lieu en Juillet avec le #15), on mesure de plus en plus quels aspects du récit Joe Henderson a sacrifié pour conclure de manière malgré tout satisfaisante.

Si l'idée des retrouvailles entre Willa et sa mère s'est imposée à l'auteur (comme il l'expliquait dans les bonus du précédent numéro), l'explication sur les années passées de cette dernière amène forcément des regrets chez les fans de la série car on devine sans mal tout ce que Henderson a dû compresser dans son récit.

En une vingtaine de pages, pourtant, le scénariste réussit fort bien à résumer une vingtaine d'années, sans décevoir. Comment Lilly Fowler a survécu, acrobatiquement, lors du "G-Day", comment elle a gagné la cité souterraine (la fameuse "solution" à l'absence de gravité trouvée par Nate), sa liaison avec Randy, le peuplement du refuge, la découverte que Willa était en vie, sa décision de lui porter secours... Tout cela est formidablement raconté.

Mais il est certain que si Skyward avait performé au niveau de ses ventes, Henderson aurait certainement consacré plus de temps à cette partie de l'intrigue. Il y avait là un matériau abondant, à l'image du concept de la série entière. Le portrait de Lilly, son évolution, et par ricochet celui de Crystal Springs, cette ville sous terre, avec ses règles arbitraires, strictes, ses illusions pathétiques, son propre sort - qui fait écho à la politique de Trump, et son refus d'accueillir des réfugiés et migrants - , sont autant d'éléments susceptibles d'alimenter des épisodes, voire des arcs entiers.

D'ailleurs, dans les deux dernières pages, la contrainte de ramasser les évènements impacte le découpage de Lee Garbett qui se voit obliger de mettre en scène un moment particulièrement important de façon maladroite. Lorsque Randy condamne l'issue de la ville, et donc empêche Barrow et Willa de ressortir (ce qui est surtout dramatique pour cette dernière, alors qu'elle devait rejoindre Edison pour l'aider contre le raid des fermiers), on a droit à une petite case en fin de page et une explosion dérisoire alors que le moment nécessitait plus de place, d'espace.

Ce bémol mis à part, le dessinateur accomplit un sans-faute. Parce que le "G-Day" a été montré de manière spectaculaire dès le premier épisode, il évite de répéter ce qu'il a déjà représenté. Tout juste s'offre-t-il une double page du point de vue de Lilly.

Ensuite Garbett enchaîne des planches rigoureuses et intimistes, avec Lilly et le chien Stranger (dont le modèle est le propre chien de Joe Henderson, comme il l'explique dans les bonus), puis avec Randy. Les années défilent et avec une économie de moyens qui force le respect, on admet leur rapprochement, leur amour, on compatit avec eux quand l'animal meurt de vieillesse. Le trait vif et expressif de Garbett est impeccable, même dans un épisode moins aérien.

Une belle leçon de narration écrite et graphique. Quel dommage que cela s'arrête bientôt, si prématurèment.    

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire