dimanche 7 octobre 2018

DOCTOR STRANGE #6, de Mark Waid et Javier Pina


Avec sa superbe couverture signée Kevin Nowlan (qui officiait déjà ponctuellement lors du run de Jason Aaron sur ce titre), ce sixième épisode ouvre le deuxième arc narratif de Doctor Strange. Mark Waid nous avait réservé un fameux cliffhanger le mois dernier et va l'expliquer en compagnie de Javier Pina (en remplacement de Jesus Saiz). Un casse-tête à résumer, mais avec un beau potentiel et des considérations rétrospectives excitantes...


Le Dr. Strange revient sur Terre avec Kanna qu'il fait entrer dans son sanctuaire sacré. Mais un autre Stephen Strange les attend et les expulse sans ménagement. Qui est le vrai sorcier suprême ? Réponse dans un combat qui se dispute dehors, dans la rue Bekker.


Distrait par Kanna que Bats le chien fantôme attaque, Stephen Strange ne peut esquiver un sort lancé par le Dr Strange revenu de l'espace et qui révèle que l'imposteur n'est autre que Casey Kinmont, une ancienne disciple, qu'il croyait morte. Elle disparaît avant d'être capturée.


Strange se rappelle alors que Casey avait passé un pacte maléfique pour le protéger et s'était donc (apparemment) sacrifiée lors d'une bataille. Il apparaît en vérité qu'elle est désormais possédée par le démon Baroshtok. Mais à quelle fin ?


Pour le savoir, Kanna propose d'aller explorer la dimension d'origine de Baroshtok pendant que Strange tente de retrouver Casey. Il ouvre un portail dans lequel l'arcanologiste et Bats le chien fantôme s'engouffrent. Il ne faut pas longtemps pour comprendre que la mort a frappé l'endroit où ils se trouvent.
    

Quant à Casey, à nouveau sous l'apparence de Strange, elle subtilise à Daimon Hellstrom, gardien des armes occultes, la lance Stygias, capable de tuer la magie, avant de neutraliser le fils de Satan...

La conclusion du premier arc plongeait le lecteur dans un doute profond sur ce que Mark Waid racontait. Le Magicien qui partait dans l'espace apprendre de nouveaux tours après avoir inexplicablement et subitement perdu ses pouvoirs sur Terre était-il un usurpateur d'identité, ayant les traits de Stephen Strange, pendant que le vrai sorcier suprême était toujours dans son sanctuaire sacré, prêt à le recevoir ? Ou bien est-ce que le locataire du 177A Bekker Street, Greenwich Village, New York, était-il un imposteur pendant que le vrai Strange était en déplacement dans l'univers ?

Le scénariste a peut-être pesé les deux voies narratives qui s'ouvraient à lui avant de trancher en faveur de la solution que donne ce sixième numéro. A dire vrai, chacune aurait été également surprenante et efficace. Mais celle retenue par Waid présente quand même des avantages accrocheurs.

Puisque le vrai Stephen Strange est celui qui a perdu ses pouvoirs et est parti en acquérir de nouveaux dans l'espace, cela veut d'abord dire que le Dr. Strange qui a combattu avec les Avengers récemment (dans le premier arc de la série de Jason Aaron) était Casey Kinmont. Une imposture fascinante - et qui légitime indirectement le fait que le sorcier ait quitté l'équipe dans Avengers #8 sans insister (notamment auprès des autres membres pour les alerter sur l'état de She-Hulk). Waid corrige à distance ce qui, chez Aaron, passait pour de la désinvolture. Savoureux.

Mais on peut aller plus loin. Depuis quand exactement Stephen Strange a-t-il quitté la Terre et est-il suppléé par Casey Kinmont ? Waid n'a pas situé temporellement son scénario, mais on pourrait penser que Strange, ayant perdu sa magie à la fin du deuxième arc du run de Jason Aaron (quand il écrivait la série), sa décision de partir date de là. Et donc le troisième et dernier arc de Aaron puis les épisodes écrits ensuite par Donny Cates (jusqu'au relaunch par Waid) mettaient en scène, en vérité, Casey Kinmont. Vertigineux.

Car Casey Kinmont, comme le révèle Waid, est sous l'emprise d'un démon (Baroshtok), et à la fin de cet épisode, elle s'empare d'une lance capable de tuer la magie (et Strange sera sa première cible évidemment). Alors, évidemment, le sorcier suprême, de retour de sa virée cosmique, est désormais aussi puissant qu'avant, voire plus (grâce aux armes qu'il a conçues à la forge de Nidavellir avec le nain Eoffren), mais l'est-il assez pour contrer un démon aussi bien équipé ? Et qui manipule une jeune femme sacrifiable à merci si les choses se gâtent ? Cela préfigure un arc passionnant (au moins sur ce plan-là, car du côté de Kanna et Bats le chien fantôme, cela paraît plus convenu - le personnage de Kanna est d'ailleurs peut-être menacé de disparition car restera-t-elle auprès de Strange maintenant qu'il est de retour chez lui ?).

Visuellement, même si c'était prévisible, la série doit se passer pour un moment de Jesus Saiz, dont le traitement graphique était un atout évident. Il est remplacé par Javier Pina, un de ses compatriotes, qui a souvent été sa doublure (même si cet artiste a aussi réalisé des séries sans Saiz dans son dos). Son style est d'ailleurs similaire, d'un réalisme classique, plus élégant que dynamique.

Cependant, Pina n'assume pas la colorisation de ses planches (il dessine et s'encre). Cette mission est dévolue ici à Brian Reber qui accomplit un travail solide, avec une palette voisine de celle de Saiz. Mais le trait bien défini de Pina rend l'image à la fois plus traditionnelle (les couleurs n'effacent pas les contours noirs des personnages et des décors, à part pour Bats le chien fantôme) et un peu plus figée. Pina pêche aussi par un manque d'expressivité. C'est moins bon, moins abouti, moins esthétisant que Saiz, mais tout de même très correct : la série conserve un niveau très respectable.

De quoi continuer l'aventure sur la base des excellentes prémisses posées par Waid - lequel, mine de rien, a su imprimer à son run un tour malicieux et prenant.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire