dimanche 22 juillet 2018

KICK-ASS #6, de Mark Millar et John Romita Jr.


Fin du premier arc narratif pour cette nouvelle version de Kick-Ass - mais le titre va continuer avec une nouvelle équipe créative. On avait laissé Patience Lee en très mauvaise posture et Mark Millar et John Romita Jr. ont prévu une conclusion musclée pour la première aventure de leur héroïne.


Patience Lee est conduite dans une usine désaffectée par Mr. Solo afin d'y être interrogée sur celui qu'elle est accusée de servir, comme le pense Hoops Lucero. Bronco, le gérant de la boîte de nuit que Kick-Ass avait braquée lors de sa première sortie, est également là et veut se venger de l'humiliation subie.


Bien que sa petite fille, Molly, soit aux mains de ces crapules, Patience garde son calme et réfléchit au moyen de se sortir de ce mauvais pas. Elle est seule contre une quinzaine d'hommes armés et a trente minutes avant l'arrivée de Hoops.
  

Grâce à une épingle dans la doublure d'un de ses gants, elle parvient à crocheter ses menottes, puis, saisissant la chaise sur laquelle on l'a assise, elle s'en sert pour frapper Solo. Puis Patience fonce dans le tas, poussant Solo contre Bronco et plusieurs de leurs sbires. Elle se tourne ensuite et bondit contre un autre gangster avec lequel elle se défenestre.


Sa chute du haut de trois étages est amortie en partie par le corps de son adversaire et elle s'en tire avec quelques côtes brisées mais surtout un flingue. Avec cette arme, elle abat méthodiquement le gang et récupère Molly. Puis elle piège Hoops qu'elle exécute devant ses hommes de main.


Devenue la chef des sbires de Hoops, elle neutralise ses rivaux et pacifie la ville en redistribuant une partie de l'argent qu'elle vole ainsi à la collectivité. Kick-Ass est la nouvelle reine de la cité.

On pouvait (presque) trouver ce premier arc bien calme compte tenu du goût de Mark Millar pour les récits musclés et de John Romita Jr. pour la baston homérique. Mais en vérité, on le découvre dans ce sixième épisode, les deux acolytes s'étaient contenus pour la fin de leur histoire.

Le terme de cette aventure inaugurale de Patience Lee sous le masque de Kick-Ass place le personnage dans une position étonnante et ambiguë, une sorte de caïd au féminin, dirigeant son vaste gang à la manière de Robin des bois, volant aux méchants pour aider les laissés-pour-compte de l'Amérique de Trump. C'est savoureux, mais fidèle à la philosophie de cette héroïne étonnante.

Comme elle l'explique, Patience a appris une chose essentielle dans le désert, en qualité de soldat, c'est de combattre le Mal par le Mal. Elle oppose à la pègre locale des méthodes aussi brutales que les mafieux qu'elle affronte. La fin justifie les moyens et, comme une militaire, elle n'hésite pas à éliminer définitivement ses adversaires, à démontrer sa force pour s'imposer.

La nouvelle Kick-Ass n'est pas le Punisher : elle n'agit pas motivée par la vengeance, mais pour survivre et sauver sa fille, et par extension sa famille qu'elle sait menacée maintenant que son identité civile est connue de ses ennemis. Plus que la violence dont elle est capable pour se défendre et qu'elle envisage comme la seule issue pour résoudre ses problèmes, ce qui frappe chez Patience Lee, c'est qu'elle incarne une femme déterminée, rusée - deux qualités que Millar semble vouloir souligner pour donner sa définition du féminisme à l'heure du mouvement #MeToo.

John Romita Jr. rongeait certainement un peu son frein en attendant l'épisode qui lui permettrait de lâcher la bride dans des scènes d'action vigoureuses mais Millar lui a donné de quoi se défouler ici. Une fois Patience libérée de ses entraves, plus rien ne peut l'arrêter et le lecteur comprend qu'elle va gagner car son mélange de calme et de force, expliqué par sa formation militaire, est irrésistible.

En quelques bourre-pifs et une défenestration impressionnante, Kick-Ass prouve qu'elle est, comme son dessinateur, comme un fauve sorti de sa cage. Romita Jr. met en scène sa riposte avec simplicité, de manière directe, sans fioritures. On assiste à la neutralisation minutieuse des gangsters par une héroïne résolue et maline, impitoyable et sadique à l'occasion. L'aspect premier degré du dessin de l'artiste écarte toute dérision, toute distance : on n'est pas là pour rigoler. Mais c'est redoutablement efficace.

Désormais bien occupé par son partenariat avec Netflix (qui vient d'annoncer plusieurs adaptations de comics issus du "Millarworld", parmi lesquelles Empress et Jupiter's Legacy), Mark Millar n'a plus guère d'autre choix que de confier à d'autres le soin de poursuivre ses séries : c'est donc Steve Niles au scénario et Marcelo Frusin au dessin qui animeront le prochain arc de Kick-Ass à partir de Septembre.   

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