mercredi 27 décembre 2017

DC HOLIDAY SPECIAL 2017


C'est une tradition chez DC Comics : chaque fin d'année, l'éditeur publie un numéro pour célébrer l'esprit de Noël dans un fascicule regroupant leurs héros emblématiques écrits et dessinés par des auteurs et artistes en vue. Je n'ai pas eu toujours l'occasion de les lire mais le cru 2017 est particulièrement accrocheur avec un casting de première classe.


- The Reminder (Part 1) (Jeff Lemire & Guiseppe Camuncoli). Un barman reproche à John Constantine, le chasseur de démons, de voir toujours l'avenir en noir et menace de le mettre à la porte s'il continue de miner le moral de sa clientèle. Puis servant Clark Kent, qui doute aussi du futur, il entreprend de lui raconter quelques histoires susceptibles de lui redonner foi...

On commence par ce prologue malicieux où Jeff Lemire (de retour chez DC après un séjour en demi-teinte chez Marvel) teste les limites du cynisme de John Constantine (héros de la série Hellblazer) et de l'idéalisme de Superman. Une manière habile de présenter le programme qui va suivre, joliment mis en images par Guiseppe Camuncoli, qui a, lui aussi, quitté Marvel (où il oeuvrait sur Amazing Spider-Man) cette année.


 - Batman : Twas the night before Christmas (Denny O'Neil & Steve Epting). Conduit par Alfred Pennyworth, son majordome, Batman va délivrer le couple Brandon séquestré par Fritzy dans leur résidence de Mount Hawley. Le jeune homme agit ainsi parce qu'enfant, lui et sa défunte grand-mère s'étaient vus refuser l'hospitalité par les parents Brandon la veille de Noël et aujourd'hui l'esprit de la défunte réclame vengeance.

Le vétéran Denny O'Neil fait équipe avec un de ses plus grands fans, l'excellent Steve Epting (qui avait signé il y a quelques mois le premier arc de la nouvelle série Batwoman) et les promesses de cette collaboration inédite sont superbement tenues. Un zeste de fantastique, une ambiance tendue, le poids d'un passé douloureux, tout est là : on est comblé. Le scénario est d'une fluidité impeccable, les dessins magnifiques (avec une colorisation parfaite de Dave McCaig).


- Green Arrow & Black Canary : You better think twice (Mairghread Scott & Phil Hester). Green Arrow convainc Black Canary de se déguiser en Père et Mère Noël pour apporter des cadeaux à des orphelins. En route, ils surprennent le braquage d'un fourgon et arrêtent les voleurs mais la bagarre a raison de leurs accoutrements, quoique cela ne fasse aucune importance pour les enfants.

Le couple le plus volcanique de DC Comics nous entraîne, sous les plumes de Mairghread Scott (une découverte) et du toujours fringant Phil Hester, dans une aventure amusante et tonique. Le caractère bien trempé des deux héros dynamise un récit classique à la morale touchante sans être mièvre. Léger mais avec du swing.


- Sgt. Rock : Going down easy ! (Tom King & Francisco Francavilla). Le Sergent Rock se rappelle comment un de ses soldats de la "Easy Company", Hammerman, captura un officier allemand avant qu'un obus n'explose près d'eux. Bien que blessé par un éclat de shrapnel, Hammerman garda huit nuit d'affilée son prisonnier sous la menace de son fusil, attendant des renforts, avec confiance, motivé par la fierté pour un juif comme lui d'avoir eu un nazi.

Quand, il y a quelques semaines, Tom King avait annoncé avoir "pitché" à DC Comics une histoire du Sergent Rock (immortalisé pendant longtemps par le légendaire Joe Kubert), bien des dessinateurs s'étaient portés candidats pour participer au projet. Avant peut-être de voir plus grand, le scénariste de Mister Miracle a produit cette nouvelle avec Francesco Francavilla, une histoire dramatique (la plus noire du lot) mais poignante, où le découpage en "gaufrier" porte la signature de King. La prestation de l'artiste est plus inégale, mais ne boudons pas notre plaisir.


- The Flash : Hope for the holidays (Joshua Williamson & Neil Googe). Flash affronte le Rainbow Raider dans l'aéroport de Central City, mais sa victoire provoque une chute de neige qui empêche tout avion de décoller. Pour s'excuser, il transporte les uns après les autres chacun des passagers à sa destination... Avant de retrouver à San Francisco Wally West pour réveillonner tranquillement avec lui.

L'équipe qui anime la série Flash mensuellement est aussi aux commandes de ce récit très divertissant, qui dégage un vrai charme. Joshua Williamson imagine une situation issue des conséquences d'un affrontement remporté par le héros et en tire un rebondissement savoureux. Neil Googe illustre ça de manière très expressive, avec la vivacité qui sied au speedster en chef de DC.


- Deathstroke : A Wilson christmans family (Christopher Priest & Tom Grummett). Alors qu'il jure au téléphone à sa femme Adeline qu'il est en train de lui acheter son cadeau de Noël, Slade Wilson remplit un contrat en compagnie de Wintergreen. Mais il se replie aussitôt sa mission accomplie pour rejoindre sa famille victime d'un accident de la route sans gravité, pour la plus grande joie de son fils.

Sans discussion, le segment le plus faible et même le plus déplacé de la collection : on ne comprend pas bien ce que fait là un tueur comme Deathstroke (quand bien même le personnage bénéficie de sa propre série mensuelle) et je m'étonnerai toujours du prestige dont jouit Christopher Priest comme scénariste car son histoire ne vaut pas grand-chose. Tom Grummett imite assez bien le style de José-Luis Garcia-Lopez, mais ne sauve pas l'affaire. Un faux pas.


- Superman & Lois Lane : Driver's seat (Max Landis & Francis Manapul). Après avoir arrêté un scientifique licencié de son laboratoire et qui venait de commettre un vol, Superman le remet à la police et Clark Kent rejoint Lois Lane qui vient d'emboutir sa voiture. Tenant à ce véhicule qu'elle possédait depuis l'université, elle tente de se changer les idées en passant les fêtes chez des amis. Superman lui fait un touchant cadeau, plein d'à-propos, pour la consoler.

En revanche, les retrouvailles de Max Landis et Francis Manapul, après leur épisode dans la mini-série Superman : American Alien, est une vraie merveille. Le scénario tient à peu de choses mais possède un charme indéniable et surtout exploite superbement l'image de Superman, éternel bon samaritain, un peu moraliste, très philosophe, et généreux. Les dessins sont somptueux, évoquant parfois Will Eisner par leur force expressive mais sans emphase. Un pur bonheur.


- Atomic Knights : Silent Night (Dan Didio & Matthew Clark). Le Maire de Durvale alerte ses citoyens d'une attaque de trèfles mutants, menée par l'ancien chevalier atomique Javins. Les compagnons de ceux-ci refusent de le croire mais se préparent à l'assaut. En vérité, les plantes veulent sceller un accord de paix en se joignant pour Noël aux habitants de la cité ayant survécu à la guerre nucléaire.

Difficile de dire "non" au patron et donc Dan Didio a glissé son histoire dans les onze fables de ce numéro : le résultat est franchement quelconque, pas honteux ou indigne mais dispensable. Les dessins de Matthew Clark sont soignés. Voilà, voilà.



- Teen Titans : Holiday spirit (Shea Fontana & Otto Schmidt). San Francisco est attaquée par des spectres terrifiants mais les Teen Titans les font fuir. Starfire, qui ne comprend pas pourquoi les humains célèbrent Noël, s'éloigne lorsqu'elle repère un dernier esprit effrayant les civils et intervient pour le chasser avec le renfort de ses amis. Elle saisit alors ce que signifie l'esprit de cette fête.

L'argument est plutôt malin - jouer sur l'incompréhension culturelle de Starfire - mais il est faiblement développé par Shea Fontana, plus intéressée par l'action que par l'esprit de Noël pourtant convoqué dans le titre de son récit, qui se clôt de manière mièvre. Les dessins d'Otto Schmidt ont une fraîcheur certaine mais manque de consistance, à l'image de ce qu'ils doivent illustrer. Bof.


- Swamp Thing : The echo of the abyss (Scott Bryan Wilson & Nic Klein). Depuis six mois en quarantaine dans la station spatiale Archer, l'équipage n'a pas le coeur à fêter Noël comme le voudrait Ciampo car sur Terre la menace d'une guerre gronde. Démoralisé, il songe à se suicider mais la branche de gui qu'il a laissée tomber se transforme en la créature du marais et tente de le rassurer. A son réveil, incapable d'expliquer sa mésaventure, Ciampo a la bonne surprise de voir ses co-équipiers préparer la décoration d'un sapin.

Une surprise positive que ce récit mettant en scène de façon fugace la Swamp Thing dans un cadre inattendu : je n'avais rien lu de Scott Bryan Wilson auparavant mais il s'en sort très bien. Et il profite aussi de la contribution non négligeable d'un excellent dessinateur en la personne de Nic Klein (dont la série Drifter, écrite par Ivan Brandon, vient de s'achever chez Image), dont le style est bien inspiré par celui de Moebius et ses disciples franco-belges, comme Ralph Meyer. Epatant.


- Batman & Wonder Woman : Solstice (Greg Rucka & Bilquis Evely). Batman arrête un voleur à la tire une nuit tandis que Wonder Woman apporte de l'eau potable à des immigrés à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis. Leurs bonnes actions accomplies, ils se retrouvent pour célébrer le solstice d'hiver devant un feu de bois dont la lumière leur rappelle que celle-ci triomphe toujours.

En quelque sorte, la lettre d'adieu de Greg Rucka à sa chère Wonder Woman (dont il a laissé l'écriture depuis peu à James Robinson) qu'il associe à Batman dans une histoire soulignant, un peu pesamment, les différences symboliques : le protecteur de Gotham agissant la nuit, l'amazone intervenant le jour, tous deux s'accordant sur le fait que Superman contrairement à eux produit sa propre lumière. Pas très subtil mais divinement dessiné par la talentueuse Bilquis Evely, un talent que DC devrait plus exploiter (elle s'est exercée sur WW sans s'attarder).
  

- The Reminder (Part 2). Clark Kent, revigoré par les fables du barman, retrouve John Constantine dehors et pour lui remonter le moral l'invite à dîner chez lui, en famille. Suffisant pour apaiser le cynique détective de l'occulte ?

La chute, qui renoue avec l'introduction mettant en scène le duo Clark Kent-John Constantine, est savoureuse et referme ce consistant fascicule dont le bilan global est plus que satisfaisant. Dommage que Marvel n'imite pas son concurrent avec une publication semblable... A l'année prochaine pour un nouveau numéro !

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