dimanche 10 septembre 2017

SOUS LE MÊME TOIT, de Dominique Farrugia


Citer le nom de Dominique Farrugia, c'est se rappeler avant tout des "Nuls", la bande d'humoristes dont il faisait partie du Canal + dans les années 80 (avec Alain Chabat, Chantal Lauby et le regretté Bruno Carette), et la nostalgie s'invite forcément en pensant à leurs sketchs décapants, à l'audace intacte.

Le groupe s'est depuis séparé, et même si ses membres jurent être restés amis et proches ils n'ont jamais plus travaillé ensemble depuis La Cité de la Peur (réalisé par Alain Berbérian, récemment disparu). Alors, on suit, d'un oeil pour ma part, les efforts de chacun : Lauby comme actrice principalement après un essai sans suite derrière la caméra, Chabat des deux côtés de l'objectif, et donc Farrugia, producteur-cinéaste aux comédies très inégales. Sous le même toit est don dernier opus en date.
 Delphine et Yvan (Louise Bourgoin et Gilles Lellouche)

Confrontée à l'usure de leur couple, Delphine offre à Yvan de pimenter leur vie sexuelle en s'accordant chacun une aventure extra-conjugale. Malgré sa réaction embarrassée, Yvan en profite le premier et l'avoue à Delphine qui décide ipso facto de rompre.
20%, pas plus !

Littéralement à la rue, après avoir un temps trouvé refuge chez son meilleur ami Nico, propriétaire d'un club de foot, Yvan mise tout, pour rebondir, sur la signature du seul footballeur dont il défend les intérêts, un jeune espoir du ballon rond. Mais en attendant d'empocher le pactole, que faire pour ne pas sombrer dans la clochardisation ?
Delphine et Mélissa (Louise Bourgoin et Marilou Berry)

Nico lui suggère alors de demander à Delphine non seulement pardon mais aussi de respecter ses droits de co-propriétaire de leur maison, dont il détient 20%. La jeune femme est obligée d'accepter d'héberger son ex à moins de lui racheter ses parts, et elle n'en a pas les moyens. 
Yvan, William et Delphine (Gilles Lellouche, Julien Boisselier et Louise Bourgoin)

La cohabitation ne va pas être paisible car Delphine, entre temps, tente de séduire William, un collègue chirurgien (elle est infirmière). Yvan reprend ses mauvaises habitudes, passant plus de temps à glander qu'à consolider sa situation professionnelle. Et les enfants, Lucas et Violette, n'en peuvent plus de cet étrange manège, au point de préférer aller habiter chez leur grand-mère maternelle. 
Lucas, Delphine, Yvan et Violette (Kolia Abitebol, Louise Bourgoin,
Gilles Lellouche et Adèle Castillon)

Lorsque son joueur de foot, très attaché aux valeurs familiales, découvre que Yvan lui a menti sur son couple prétendument idyllique, il est prêt à signer avec un autre agent. Yvan supplie alors Delphine et leurs enfants de l'aider dans une mise en scène pour récupérer son protégé, en échange de quoi il s'engage à déguerpir puisqu'il sera renfloué.  
Yvan et Nico (Gilles Lellouche et Manu Payet)

Invités au mariage de Nico et Melissa (la meilleure amie de Delphine, infirmière comme elle), Yvan et Delphine se confient à d'autres convives qui leur demandent si, finalement, ils se sont réconciliés et remis ensemble...

En 1996, Dominique Farrugia signait son premier long métrage, Delphine : 1, Yvan : 0 (avec Julie Gayet et Serge Hazanavicius), une tentative de rom-com (comédie romantique, comme les américains en fabriquent à la chaîne) assez improbable puisque reposant sur un dispositif narratif particulièrement saugrenu - il s'agissait de faire commenter, par les vrais Jean-Michel Larqué et Thierry Roland, l'histoire d'amour des deux héros comme s'il s'agissait d'un match de foot. Ce procédé était particulièrement lourdingue, ralentissant le rythme du récit (ce qui n'est jamais inspiré pour une comédie).

Il reste des traces de cette fausse bonne idée dans cette simili-suite qu'est Sous le même toit puisque, outre que les protagonistes ont les mêmes prénoms, Yvan travaille comme agent de footballeur (le singulier est notable puisqu'il justifie la dèche du personnage). Mais heureusement, Farrugia a su tirer les leçons du passé et, avec son co-scénariste Laurent Turner, troussé une comédie très divertissante, bouclée en 90 minutes.

Même si on peut déplorer que le récit s'inscrive dans un long flash-back (ou plutôt une suite de retours en arrière, à mesure que Delphine et Yvan racontent leur histoire à des invités du mariage de Nico et Mélissa), pour suggérer un pseudo-suspense sur leur réconciliation, le résultat est efficace car on rit de bon coeur sans que le sujet évite les moments de crise. On n'est toutefois pas dans le registre, féroce, de La Guerre des Rose (Danny de Vito, 1989) où Michael Douglas et Kathleen Turner se livraient une guerre délirante en se séparant. Manque d'audace ? Peut-être. Farrugia, de toute façon, semble être un vrai sentimental, tous ses films (dont la majorité sont quand même mauvais, inaboutis, véhicules pour acteurs vedettes ou sur le point de l'être) n'osent jamais aller aussi loin que ce qu'il commettait avec les "Nuls" (Chabat est un peu plus déjanté, mais globalement aussi sage).

Et, donc, ici aussi, une fois encore, les comédiens sont gâtés : mis en valeur par une photographie soignée et une mise en scène discrète, Louise Bourgoin et Gilles Lellouche forment une paire formidable. Elle, enceinte durant le tournage, est d'une sensualité folle tout en se lâchant dans des moments de pure vacherie. Lui est irrésistible en loser roublard, avec une collection de scènes imparables (comment troubler une partie de poker de belle-maman en se baladant à poil devant elle et ses copines et en faisant un "self-cul"). Si Manu Payet et Marilou Berry sont étrangement éteints, en revanche Julien Boisselier est excellent en amant dépassé (par la situation de Delphine mais aussi par ses propres enfants, dont son fils menaçant Yvan avec un fusil de chasse parce qu'il n'a toujours pas digéré le divorce de son père).

Tout ça est donc inoffensif mais distrayant. Parfait donc pour se détendre facilement.  

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