dimanche 20 août 2017

BATMAN, VOLUME 1 : I AM GOTHAM, de Tom King, David Finch et Ivan Reis


Je vous ai récemment fait part de la grande impression que m'avait fait Tom King à l'occasion du premier épisode de la maxi-série Mister Miracle. L'ex-co-scénariste de Grayson (avec Tim Seeley) est visiblement devenu un auteur sur lequel mise beaucoup DC Comics puisqu'on lui a confié rien moins que la conduite de la série Batman.

En succédant à Scott Snyder (qui animait le héros durant les "New 52"  avec lequel il a signé le n° 0, Rebirth", assurant ainsi une transition organique pour titre), King n'a pas tardé à imprimer sa marque avec son premier arc, I Am Gotham, en six épisodes.

L'aventure démarre spectaculairement avec un avion de ligne qui menace de se crasher sur Gotham. Batman s'emploie aussitôt à empêcher la catastrophe tout en accomplissant une manoeuvre dans laquelle il risque d'y passer. Mais alors qu'il est sur le point de demander à Alfred Pennyworth d'appeler Superman en renfort, l'appareil est dérouté et ses passagers avec Batman sauvés grâce à l'intervention de deux jeunes surhumains : Gotham et sa soeur Gotham Girl.  

Inspirés depuis leur enfance dans la métropole par la figure protectrice de Batman, ils ont utilisé la fortune de leurs parents pour en aider les citoyens, de manière humble. Mais cela ne suffisait pas et ils ont enduré un entraînement physique intensif puis sont partis au secours de civils dans des zones de guerre à l'étranger. Dans une de ces lointaines contrées, ils ont acquis, sans préciser comment, des super-pouvoirs. Désormais ils veulent collaborer avec Batman et s'améliorer encore à son contact.

Batman ne refuse pas leur aide, d'autant que ses ennemis menacent la ville incessamment, au point qu'il soupçonne que quelqu'un organise ces attaques. Il en aura la confirmation quand le Dr. Hugo Strange rend enragé Gotham grâce au Psycho-Pirate. Pour Batman, il s'agit alors de neutraliser le jeune homme dont l'état dévaste mentalement sa soeur...

L'argument de l'histoire est simple mais accrocheur : que se passerait-il si Gotham n'avait plus besoin de Batman grâce à l'apparition de surhumains aussi puissants que Superman ? Certes, Hank et Claire Clover demandent à Batman de parachever leur formation, mais pour le dark knight, cette situation remet son statut entier en question. 

Plutôt que de la méfiance, Bruce Wayne y voit d'abord presque une opportunité, d'autant qu'il a constaté son impuissance à empêcher le crash de l'avion et sait que sa ville est en proie, depuis toujours, à la menace de super-vilains, moins intelligents que lui mais plus costauds. Si un cerveau criminel préparait un assaut d'ampleur de ces monstres, arriverait-il à le repousser ? Rien n'est moins sûr.

Pour raffiner son affaire, Tom King a pris soin de donner quand même une faille à Gotham et Gotham Girl : s'ils ne détaillent pas comment ils ont acquis leurs pouvoirs (autrement qu'à l'étranger lors de missions humanitaires), on apprend rapidement que plus ils les utilisent (en fréquence et en intensité), plus ils écourtent leur durée de vie - ce qui introduit une notion sacrificielle à leurs actes héroïques.

Le récit bascule lorsque l'un d'eux tombe dans un piège et perd les pédales, les événements s'enchaînent dramatiquement ensuite et aboutissent à un épilogue étonnant par l'émotion qu'il produit - et aussi parce qu'il renvoie au dénouement du premier arc de Detective Comics, vol. 1 : Rise of the Batmen. Cette chute donne un relief inattendu à une intrigue que ses six épisodes rendraient presque expédiée (mais c'est aussi par que l'arc narratif est très bien rythmé).

David Finch s'occupe du dessin de cinq des épisodes et réussit un Batman massif qui offre un contraste intéressant avec les doutes qui l'assaillent. Le dessinateur maîtrise en tout cas la représentation du héros et réussit de belles séquences, bien cadré par un script qu'on devine directif. L'épilogue est illustré par Ivan Reis et, évidemment, avec le talent exceptionnel de l'artiste (même si, depuis quelque temps, il a du mal à se fixer sur un titre durablement en tenant les délais), le chapitre y gagne en subtilité : il est question de deuil, de folie, de consolation, et toute la détresse partagée par Batman et Gotham Girl sont superbement rendue par un trait expressif, un travail sur les angles de vue intelligent : une pièce d'orfèvrerie. (Bimensuelle, la série sera dessinée alternativement, d'un arc à l'autre, par Finch et Mikel Janin, plus Clay Mann pour des intermèdes : le lecteur est gâté.)

On peut tout à fait se passer du n° 0 pour entrer directement dans le vif du sujet de I Am Gotham, qui se présente comme un début moins flamboyant que pour Detective Comics, mais la suite (Batman obligé d'infiltrer la prison de Santa Prisca pour récupérer le Psycho-Pirate remis par Hugo Strange à Bane) promet son lot de sensations fortes.

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