samedi 16 juillet 2016

Critique 954 : GRAYSON, TOME 1 - AGENT DE SPYRAL, de Tom King, Tim Seeley, Mikel Janin et Stephen Mooney


GRAYSON, TOME 1: AGENT DE SPYRAL rassemble les épisodes 1 à 8 et le premier numéro Annual de la série, écrits par Tom King et Tim Seeley et dessinés par Mikel Janin (#1-6, 8) et Stephen Mooney (#7 et Annual #1), publiés en 2014-2015 par DC Comics, traduits en France en 2015 par Urban Comics.
(Extrait de Grayson #1.
Textes de Tom King et Tim Seeley
dessins de Mikel Janin.)

Capturé par le Syndicat du Crime (voir la saga Forever Evil, écrite par Geoff Johns et dessiné par David Finch), Dick Grayson alias Nightwing (ex-Robin, partenaire de Batman et leader des Teen Titans) a été publiquement démasqué avant d'être tué. 
Mais sa mort était maquillée afin de lui permettre de reprendre ses activités de justicier. C'est ainsi qu'il infiltre, pour le compte de Batman, l'organisation secrète Spyral, qui espionne les super-héros.
Sous la direction du mystérieux Mr Minos et avec Helena Bertinelli comme agent de liaison et partenaire sur le terrain, il effectue, sous le nom de code de l'Agent 37 et à visage découvert (mais préservant quand même son anonymat grâce à l'Hypnos, un dispositif brouillant ses traits), ainsi une série de missions, aux quatre coins du monde, consistant à rassembler les organes de Parangon, conférant à ceux qui les détiennent des super-pouvoirs.
Son chemin va croiser celui du Midnighter, un méta-humain, capable d'anticiper toutes les techniques de combat de ses adversaires, et lui aussi à la recherche des super-organes. Dick parvient à rester en contact avec Batman en communiquant par radio, sur une fréquence sécurisée, et en utilisant les pseudonymes "Malone" et "Ornithologue".
Mais jusqu'à quand réussira-t-il à doubler l'agence Spyral ?
(Extrait de Grayson Annual #1.
Textes de Tom King et Tim Seeley,
dessins de Stephen Mooney.)

Après avoir hésité, j'ai donc décidé de vous causer de Grayson, dont la deuxième "saison" est actuellement publiée dans la revue "Batman Univers". Cependant, en commençant à lire le 9ème épisode, qui ouvre cet Acte II de la série, je me suis rendu compte qu'il était nécessaire de revenir au début du titre et je me suis donc procuré l'album publié par Urban Comics, qui rassemble les 8 premiers chapitres et le premier Annual (l'équivalent des deux premiers trade paperbacks US).

J'avais découvert Grayson en achetant les exemplaires de "Batman Saga" (le mensuel précédant "Batman Univers"), mais si la série était plaisante, je n'en gardais pas un souvenir précis et j'avais donc cessé de la lire en arrêtant vite d'acheter l'anthologie mensuelle dans laquelle elle paraissait. Il faut donc saluer l'initiative de l'éditeur français de proposer rapidement (si vite d'ailleurs maintenant que cela se fait en simultané !) en albums (toujours aussi bien confectionnés) aussi vite des titres disponibles autrement dans leurs mensuels, et pour des prix très raisonnables (plus de 200 pages, en format cartonné, sur du beau papier, pour moins de 18 E !).

Le contenu maintenant. Si le reboot initié en 2011 par DC Comics sous la bannière The New 52 a connu des fortunes diverses (aux niveaus artistique, commercial, critique et public), on peeut difficilement reprocher à l'éditeur de ne pas avoir pris des risques et Grayson en est un excellent exemple, jouant à fond la carte de la BD d'aventures, sur fond d'espionnage, et auquel le lectorat a répondu positivement (bien mieux que pour Winter Soldier lancé par Ed Brubaker, Butch Guice et Michael Lark chez Marvel - pourtant excellent là aussi).

Le sort du personnage de Dick Grayson a d'abord bien inspiré l'editor Mark Doyle, un ancien du label Vertigo, pilotant la franchise Batman en 2014, et voulant diversifier chaque série rattachée au protecteur de Gotham (ainsi : Arkham Manor, Gotham by Midnight, Batgirl, Catwoman, Gotham Academy). Le sidekick de Batman est pourtant un ancien de la maison : sa création remonte à 1940 et Detective Comics #38, quand il est apparu, gamin trapéziste recueilli par Bruce Wayne après le meurtre de ses parents. Il deviendra donc Robin, flirtera longtemps avec Barbara Gordon/Batgirl, puis sera le leader des Teen Titans dans les années 60. Vingt ans plus tard, Marv Wolfman et George Pérez lui donnent une autre envergure en le rebaptisant Nightwing à la tête des New Teen Titans.

Sous cet alias, il a droit à sa propre série à partir de 1996 et devient le gardien de la ville de Blüdhaven, une localité proche de Gotham City, partageant une ambiance et une criminalité relativement proches. Il remplacera même Bruce Wayne comme Batman quand son mentor sera un temps considéré comme mort.

Aujourd'hui, ce sont donc les scénaristes Tim Seeley (Revival, chez Image Comics) et un ancien agent de la CIA, Tom King, qui président à ses nouvelles aventures. Les dessins sont assurés par Mikel Janin, étoile montante de DC (après des prestations de haut niveau sur Justice League Dark notamment), au style élégant, réaliste, aussi à l'aise dans les scènes calmes que dans l'action la plus débridée.

Ces huit premiers épisodes et l'Annual sont un régal à lire : le cadre des histoires sont exotiques, on voyage beaucoup, les missions sont palpitantes, jonglant habilement avec les clichés du genre à coups de doubles (voire triples) jeux, donc de secrets, de manipulations. Il n'est pas difficile de frissonner pour Dick Grayson qui met sa vie en danger au service de l'organisation Spyral (pour laquelle il n'est qu'un pion, certes doué, mais sacrifiable) et pour le compte de Batman (à qui il transmet des informations sur son employeur et ce qu'il convoite).

King et Seeley prennent soin de conserver toujours une certaine dérision, une ambiance décontractée et des personnages très glamour (Dick comme Helena Bertinelli ont des physiques dignes de top models). Parfois, cela se retourne presque contre leur projet car le suspense manque d'intensité (il ne fait guère de doute que Grayson s'en tirera toujours) et le héros manque d'aspérités (toujours relax, d'une droiture morale jamais prise en défaut : j'aurai bien aimé le voir un peu douter de lui-même, de Batman, surtout que le garçon revient de loin et doit tout faire pour qu'on continue de le croire mort). Enfin, l'intégration du Midnighter (rescapé du label Wildstorm) apparaît un peu artificielle (il s'agit à l'évidence de donner un coup de projecteur à sa propre série, mais en même temps, la présence d'un personnage créé - par Warren Ellis - comme une parodie - à la fois encore plus cynique, violente et homosexuelle - de Batman aux côtés de celui qui fut le premier partenaire de celui-ci produit un curieux effet).

Mais ne boudons pas notre plaisir, surtout que les auteurs nous gratifient aussi, avec l'Annual, d'un épisode, non seulement plus long (comme c'est l'usage) mais aussi plus sophistiqué sur le plan narratif : Grayson doit composer avec un baratineur qui a capturé Helena Bertinelli et qui le noie sous un tas d'histoires métaphoriques comme pour le tester. Ce savoureux chapitre sur un menteur qui fait affaire avec un héros lui-même obligé de mentir à tout le monde bénéficie des illustrations de Stephen Mooney, dont le trait est plus dur que celui de Janin mais très prometteur (à confirmer car quelques plans sont un peu maladroits concernant leur composition).

L'intrigue de cette première "saison" se dénoue un peu abruptement, mais les cartes sont rebattues pour de nouveaux volets accrocheurs... 

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