samedi 22 septembre 2012

Critique 349 : TOM STRONG AND THE ROBOTS OF DOOM, de Peter Hogan et Chris Sprouse



Tom Strong and The Robots of Doom rassemble les six épisodes de la mini-série écrite par Peter Hogan et dessinée par Chris Sprouse, publiée en 2010-2011 par DC Comics
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Quand il a créé ce personnage, Alan Moore a voulu rendre hommage à sa manière à l'archétype du héros de l'âge d'or, un aventurier vertueux, un "héros de la science" comme il l'a défini : Tom Strong était la sytnhèse de Doc SavageTarzanSuperman, et ses histoires évoquaient les pulp-fictions américaines classiques, avec leur lot de clichés et de rebondissements, de créatures excentriques et de situations rocambolesques. Tom Strong, ce gaillard robuste, comptait plus sur son intellect pour résoudre divers conflits mais n'hésitait cependant pas à faire le coup de poing quand cela l'exigeait.

Quand il a quitté définitivement le giron de DC Comics, avec qui il était en conflit ouvert depuis les rééditions de Watchmen, mais qui devint ensuite propriétaire du label Wildstorm au sein duquel il avait développé la collection America's Best Comics (avec des titres comme Promethea, Tomorrow's Stories, Top Ten et Tom Strong donc), Alan Moore termina toutes les séries qu'il avait initiées lors d'un crossover qui mettait en scène la fin du monde tout en laissant quelques portes ouvertes.
C'est ainsi que Tom Strong revient avec cet album, qui s'inscrit dans la continuité de son 36ème et (croyait-on) dernier. Aux commandes, on trouve deux familiers de la série : son co-créateur et dessinateur, Chris Sprouse, et le scénariste de quelques épisodes, Peter Hogan (avec lequel Moore créa la mini-série dérivée, Terra Obscura).
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Alors que sa fille, Tesla, est sur le point de se marier avec Val, régent des hommes de lave, et que la famille va célèbrer les noces à Attabar Teru, Tom Strong procède à un examen du chromium en compagnie du fantôme de Paul Saveen. Ce dernier disparaît subitement et Tom comprend que quelque chose cloche. Il se précipite dehors et découvre, horrifié, que son monde a totalement sombré dans le nazisme. Son fils, Albrecht (qu'il a eu avec Ingrid Weiss), est devenu le maître de cette nouvelle terre et le fait enfermer.
Tom, touché mais pas abattu, veut comprendre comment cela est devenu possible et Albrecht lui donne quelques explications : il s'est allié, en remontant dans le temps, avec les Deros, des robots abandonnés sur terre par des voyageurs spatiaux dans un passé très lointain. Désireux de se venger de la race humaine après que Tom les ait rencontrés et que l'armée ait préféré les engloutir alors qu'ils réclamaient un territoire, ils ont permis à Albrecht et aux nazis de conquérir le globe. Dans l'affaire, Tom a perdu tous les siens : sa femme, sa fille, Solomon...
Tous, vraiment ? Sauf Pneuman qui a feint d'obéir aux ordres d'Albrecht et permet à Tom de s'échapper en remontant lui aussi le cours du temps, avant que son fils, les nazis et les Deros ne liguent leurs forces.
Là, en Septembre 1939, Tom Strong va faire équipe avec lui-même, plus jeune, mais aussi les hommes de lave et son ennemi, Pluto Parulian alias Dr Permafrost, pour empêcher le pire de se produire...

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Ce qui frappe d'abord à la lecture de cette histoire, c'est son nombre d'épisodes : Alan Moore (et tous les scénaristes à qui il a permis d'animer son héros dans sa première série) a toujours veillé à construire des récits de un à trois épisodes maximum, d'une densité extrème et pourtant remarquablement fluides. Peter Hogan procède d'une autre manière, en adoptant une narration décompressée, avec six épisodes : le déroulement de l'action est toujours aussi souple, mais souffre de quelques temps morts, et surtout a pour effet immédiat une mise en images faisant la part belle à des cases plus grandes, des splashs et des doubles-pages plus fréquentes (on ne s'en plaindra pas car le dessinateur nous gratifie de plans irréprochables).

Chris Sprouse, toujours encré par Karl Story, vole du coup la vedette à son scénariste en livrant des pages superbement ouvragées, aux décors fantastiques et variés, où les personnages possèdent toujours cette élégance remarquables, avec un soin particulier accordé à leur gestuelle.
On pourrait regretter qu'il ait fallu trois coloristes (Carrie Strachan, Darlene Royer et Jonny Rench) pour finaliser tout cela, mais ce serait un mauvais procés tant les transitions entre chacun sont imperceptibles.



Peter Hogan a élaboré un scénario qui reste cependant habile, en veillant avant toute chose à le garder compréhensible, ce qui est toujours ardu avec les histoires de voyage dans le temps et les paradoxes temporels que cela engendre.
Des idées comme celle du duo formé par le Tom Strong d'aujourd'hui et celui, plus jeune, de 1939, le fait que le premier soit obligé de cacher des évènements du futur pour ne pas altérer le comportement du second quand ils lui arriveront, mais aussi la nécessité pour Tom Strong de demander de l'aide au Dr Permafrost (en devant le faire évader du pénitencier où il l'a fait enfermé), la rencontre anticipée avec les hommes de lave et leur connection historique avec les Deros, sont toutes savoureuses, malines, efficaces.
Hogan n'hésite pas non plus à bousculer le statu quo de la série et de son héros : au début, Tesla est sur le point de se marier, et à la fin une révèlation sur sa condition suggère des répercussions sensibles sur la famille Strong. Plus trouble encore est la manière dont Tom va décider de punir son fils Albrecht, qu'on peut considérer à la fois juste et dérangeante...


Le petit reproche qu'on peut adresser à Peter Hogan reste que son histoire s'adresse d'abord à des familiers, sinon des initiés de la série, tant il convoque d'éléments uniquement identifiables si on a lu les précédents épisodes. Ce choix de jouer avec la mythologie même de Tom Strong plutôt que de proposer un récit accessible pour qui ne la connaît pas est un handicap pour le néophyte qui se demandera alors pourquoi le héros a si peu vieilli en depuis 1939, qui est cette fille de glace dans le coma dans le labo de Permafrost (pour rappel, il s'agit de Greta Gabriel, le premier amour de Tom), quelle est la nature du contentieux entre Tom et Permafrost. 
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C'est toutefois une aventure divertissante, magnifiquement illustrée, et on peut remercier Alan Moore d'avoir donné son accord à Hogan et Sprouse pour continuer d'animer Tom Strong (tout le monde sait que c'est un privilège que Moore n'accorde pas facilement - cf. la polémique récente au sujet du prequel Before Watchmen).
Chris Sprouse a déjà annoncé que de nouveaux épisodes paraîtraient (prévus pour 2012, mais probablement publiés en 2013) : cela s'intitulera Tom Strong and The Planet of Peril (avec le retour des héros de Terra Obscura en guest-stars). 

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