mardi 6 septembre 2011

Critique 262 : FABLES 14 - WITCHES, de Bill Willingham, Mark Buckingham, Jim Fern et David Lapham

Fables : Witches est le 14ème recueil de la série créée et écrite par Bill Willingham, rassemblant les épisodes 86 à 93, publiés en 2009 et 2010 par DC Comics dans la collection Vertigo. Les dessins sont signés Jim Fern (#86), Mark Buckingham (#87-91) et David Lapham (#92-93).
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- Boxing Days (#86) : Pendant que ses laquais-zombies bâtissent son nouveau château dans les ruines de Bullfinch Street, Mr Dark raconte comment il a été autrefois piégé par un groupe de sorciers de l'Empire mené par un certain Dunster Happ.

- Witches (#87-91) : Les dirigeants et magiciens des Fables, à la Ferme, réfléchissent au moyen de vaincre Mr Dark. Ozma (la fillette reine du royaume de Oz) profite que Frau Totenkinder s'éclipse pour devenir la nouvelle patronne des magiciens tandis que la vieille sorcière de la forêt noire part enquêter dans les royaumes après avoir changé d'apparence. Cependant, dans l'office de la mairie de Fabletown qui est désormais dans une autre dimension, le singe Bufkin doit affronter Baba Yaga, ivre de vengeance mais également prisonnière de l'endroit depuis la destruction de Fabletown.

- Out Of The Ball Game (#92-93) : Au royaume de Haven, Flycatcher doit juger un troll accusé de meurtre. L'affaire est délicate car il veut maintenir la paix entre ses sujets tout en rendant justice à la famille de la victime.
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Après The Great Fables Crossover, la série Fables reprend pleinement ses droits et renoue avec l'histoire opposant nos héros à l'inquiétant Mr Dark.
Le premier épisode de ce tome dévoile le passé de ce méchant qui a déjà été vaincu par les sorciers de l'Empire. Cela confirme l'efficacité avec laquelle Gepetto administrait les royaumes en en maîtrisant les menaces les plus dangereuses et donne la clé pour vaincre à nouveau ce sinistre personnage, sans pour autant garantir que les Fables rééditeront l'exploit. C'est un chapitre informatif mais mollasson, qui souffre qui plus est d'illustrations trop figées de Jim Fern, dont les efforts pour faire ressembler les personnages à des acteurs (comme Liam Neeson pour Jubilee Mirant) parasitent la lecture. C'est dommage, mais ça s'améliore rapidement par la suite.
En effet, le récit central renoue avec les meilleures qualités de la série : on y assiste à la préparation de la riposte des Fables, en particulier la petite communauté des magiciens, aun coeur de laquelle Frau Totenkinder a bien mesuré le danger que représente Mr Dark. Le retrait soudain de la sorcière de la forêt noire met à jour une lutte de pouvoir et révèle l'ambition dévorante de la jeune Ozma, dont l'apparence de fillette ne dissimule pas l'arrivisme et la malice. L'autre acteur qui tente de revenir dans la partie est, comme on pouvait s'en douter depuis sa reddition à contrecoeur, Gepetto, qui brigue la place de maire, fort du fait qu'il a vaincu Mr Dark dans le passé, que Rose Red délaisse toujours ses responsabilités à la tête de la Ferme, et de la réserve de King Cole. Dans un registre politique très "politicien", Bill Willingham est beaucoup plus à l'aise que lorsqu'il a utilisé ses personnages et leur univers pour comparer la situation des Fables et celles de certains pays de notre monde.
Parallèlement, le scénariste montre les efforts de Bufkin et quelques-uns des prisonniers de l'office de l'ancienne mairie de Fabletown pour éliminer Baba Yaga. Le combat paraît bien déséquilibré au départ et d'autant plus compromis que la rage de la sorcière est aussi impressionnante que le désarroi et le manque de ressources de Bufkin et compagnie. Mais contre toute attente, et avec à la fois beaucoup d'humour et un sens du suspense aiguisé, la situation connaît des rebondissements et un renversement jubilatoires.
Pour revenir à ce qui se passe à la Ferme, Willingham n'oublie pas de traiter des conséquences pratiques de l'exil des Fables, en particulier le fait qu'ils n'ont plus leur trésor - cet argent qui permet de faire fonctionner le site, de pourvoir aux besoins de la population. Mais King Cole peut encore profiter de l'aide de Frau Totenkinder qui, bien que loin de ses semblables, ne les oublie pas - et, comble de l'ironie, se sert dans les coffres de Mr Dark lui-même.
La condition de Totenkinder réserve d'ailleurs une énorme surprise aux lecteurs, une métamorphose totalement inattendue et qui va indubitablement se prolonger dans le prochain volume, en lui donnant une dimension plus pro-active, comme lors du dénouement de La Marche des Soldats de Bois (Fables 4) où son intervention (contre Baba Yaga) avait été décisive.
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Mark Buckingham est également inspiré et livre une nouvelle fois des planches pleines de puissance, dans les séquences avec Baba Yaga, au découpage à la fois simple et juste, avec Bufkin, et à l'ambiance soignée, à la Ferme. L'artiste dispose d'une palette tellement riche que chaque partie de l'histoire est parfaitement exploitée visuellement.
On pense toujours à Jack Kirby, mais avec une élégance et une fluidité supplémentaires. La représentation saisissante de Baba Yaga ou la transformation enchanteresse de Totenkinder prouvent à quel point Buckingham réussit à rendre les moments-clés mémorables tout en animant le récit avec fluidité - et il faut un sacré talent pour captiver comme il le fait avec un singe bleu volant manoeuvrant contre une sorcière déchaînée dans un vaste capharnaüm !

Les deux derniers épisodes, dessinés par David Lapham, de façon plus agrèable que Fern sans atteindre la virtuosité de "Bucky", nous ramènent auprès de Flycatcher dans son royaume de Haven. Le début est un peu laborieux, surtout quand on est peu sensible aux subtilités du base-ball, mais finalement ce conte débouche sur une morale habilement référencée (l'histoire du scorpion et du crapaud traversant une rivière, métaphore sur la nature profonde de chacun). Et Willingham montre qu'il n'oublie pas ces personnages désormais à l'écart.
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Après un crossover déjanté mais mitigé, Fables nous tient à nouveau en haleine tout en garantissant des prolongements palpitants. Avec le 100ème épisode en vue, on peut sereinement espérer la fin d'un cycle à la hauteur.

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